CINEMA : Stefan Zweig, adieu l’Europe.
Un film de Maria Schrader.
L’univers d’un écrivain peut paraître fascinant, à fortiori celui d’un écrivain adulé, puisqu’il s’agit de Stefan Zweig, connu et reconnu à son époque. Juif allemand contraint à l’exil, en accord avec ses convictions profondes, il va jusqu’à se mettre en porte à faux avec ses congénères quand il refuse de prendre parti contre l’Allemagne en 1935 : Il ne veut pas être contre quoique ce soit, faisant passer son humanisme avant tout, lui que l’on retrouve dans ses rêveries, admirant les paysages du Brésil. L’homme et l’œuvre semblent ici parfaitement honorée portant à bout de bras la liberté d’expression.
Ce film bouleversant nous fait également nous interroger sur l’existence d’une identité fidèle à ses principes, ses conditions et à son expérience jusqu’à l’extrême puisque la mort est choisie plutôt que céder à cette souffrance qu’entraîne cette confrontation entre la réalité et son identité, le choix de la mort et de l’absolu. Ce choix semble la meilleure issue, le plus beau point en bas de la page de la vie de cet homme qui a refusé d’accepter une Europe perdue à jamais, désespéré par le conflit dont il ne voyait pas la fin. Sa souffrance révèle l’ultime combat et somme toute, la défaite qu’il accepte en mettant fin à ses jours. Personnage entier, il ne lui reste que cette solution face à son désespoir, qu’il confie à son ami peu avant, avec sans doute la certitude qu’il doit pour toujours renoncer à son pays et ses origines.
Nous suivons les progressions de la guerre et de l’évolution de cet écrivain hors norme par des tableaux mentionnant pour commencer les dates des événements, scandant l’évolution de son histoire face à l’histoire, terminés parfois brutalement. Ce n’est certes dans doute pas un défaut de montage, mais la brutalité de la vie quotidienne, La violence des combats intérieurs, de ses questionnements rendue dans la forme. Ses attentes, ses rêves ses désespoirs, tout est palpable dans le film et deviennent nôtres autant que ses questions d’homme intègre.
La beauté des images complète ce témoignage. Un film poignant, des acteurs admirables, le spectateur est lui aussi ballotté dans l’histoire de cette vie peu ordinaire.
Un film à ne pas manquer, pour un voyage auprès d’un être qui nous a laissé aussi des écrits exceptionnels et qui nous donne envie de relire son œuvre et notamment « Le joueur d’échec », nouvelle écrite en 1942, un peu avant son suicide, et publié après sa mort, que nous relirons sans doute autrement, parce qu’une œuvre n’est jamais séparée de son auteur.
Joëlle Thienard
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Stefan Zweig, adieu l’Europe
Durée : 1h 46
Distribution : ARP sélection
Musique : Cornélius Renz Tobias Wagner
Scénario : Marria Schrader, Jan Schomburg
Acteurs : Joseph Hader, Barbara Sukowa, Matthias Brandt
Sélectionné pour le prix du film allemand de la meilleure réalisation, et du prix du film allemand de la meilleure actrice dans un second rôle.
Sortie le 10 août 2016 (France)